Yevrobatsi, 02'06'2006
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Halte !
Publié le : 02-06-2006
Un livre de Gregory Buchakjian

par Christopher Atamian

En Egypte contemporaine, attention à ce que vous osez dessiner…
Sortie aux éditions genevoises Labor et Fides, Halte ! est une nouvelle, courte (102p) mais érudite, qui raconte une remarquable aventure dont l’auteur fut lui-même victime lors d’un voyage récent à Alexandrie.

Professeur d’Histoire de l’Art au Collège Saint-Joseph à Beyrouth et écrivain de voyages, Buchakjian commet l’erreur fatale de faire un croquis du Consulat de France dans son petit carnet de voyage. Un policier d’origine douteuse intervient alors (travaille-t-il vraiment pour l’ambassade ? est-il vraiment agent de police ?) qui lui explique qu’il est strictement interdit de photographier l’ambassade. Buchakjian a beau lui expliquer qu’il ne photographie rien ; les croquis sont apparemment, eux aussi prohibés. Suit alors toute une pantalonnade au cours de laquelle Buchakjian est arrêté, mis en prison, transféré aux services secrets Egyptiens, etc.

Accusé de terrorisme—on s’en doute bien !—voilà donc tout le système maffieux égyptien qui tente d’extorquer de l’argent des touristes et autres innocents qui ne font pas strictement attention aux plus idiots des règlements.

Buchakjian s’amuse à décrire ces infects petites gens friands de pouvoir et d’argent. Mais parfois le ton de cette critique dépasse l’ironie pour révéler un léger ton de supériorité de la part du narrateur, (ton que l’on aurait aimé qu’ évite Buchakjian): "Le Dhabet a le look d’un étudiant en 2ème année dans une fac de gestion Anglophone, celui qui ne brille pas par son niveau d’études mais que tout le monde aime bien parce que c’est un chic type." (p.34.)

Cependant au fur et à mesure que se développe l’intrigue, le lecteur se voit emporté par les évènements surréels de cette aventure Alexandrine.

Halte! est un livre sans grande morale, écrit dans un style sobre et sans prétention. C’est ce qui fait précisément sa grande force, car en racontant une histoire aussi improbable avec légèreté et humour, Buchakjian devient aussi le critique de cette société policière Egyptienne, homophobe et rétrograde, qui est à deux pas de la dictature. Nous montrer cela en partant d’une petite anecdote de voyage, c’est déjà pas mal.